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Introduction : Le syndrome hémolytique et urémique (SHU) réunit un ensemble de pathologies hétérogènes dont la prise en charge diagnostique et thérapeutique reste difficile. Notre objectif était de décrire les caractéristiques cliniques et biologiques des patients sévères admis en réanimation pour un SHU et évaluer l'impact des thérapeutiques courantes sur la fonction rénale. Matériel et méthodes : Nous avons mené une étude rétrospective multicentrique sur 5 ans de 2014 à 2019 des patients admis pour un SHU avéré dans quatre réanimations françaises. Le SHU était défini par la présence d'une anémie avec des arguments en faveur d'une origine hémolytique et non auto-immune, associée à une thrombopénie, ou avec des signes histologiques de microangiopathie thrombotique. Les caractéristiques cliniques, les caractéristiques biologiques et les thérapeutiques initiées pendant le séjour en réanimation ont été recueillies rétrospectivement. La fonction rénale a été évaluée par l’évaluation du débit de filtration glomérulaire (DFG) grâce à la formule du Chronic Kidney Disease EPIdemiology collaboration (CKD-EPI) à 30, 90 et 180 jours. Nous avons également évalué la mortalité à 30 jours. Nous avons comparé l'impact de l'utilisation des échanges plasmatiques, de l'Eculizumab et de l’épuration extra-rénale (EER) pendant le séjour en réanimation sur la fonction rénale à distance. Résultats : Cent-trois patients ont été inclus (âge médian 54 [32-65], hommes 48 (47%)). Vingt-sept (26%) avaient un SHU lié à une infection par Escherichia coli producteur de Shiga-toxines (STEC-SHU), 13 (13%) un SHU lié à une anomalie du complément (SHUa) et 59 (57%) un SHU secondaire. Parmi ces patients, 71 (69 %) ont reçu un échange plasmatique, 18 (18 %) ont reçu de l'Eculizumab et 46 (45 %) ont reçu une EER pendant leur séjour aux soins intensifs. Quatre-vingt-douze (89 %) ont survécu à la sortie de réanimation et 78 (86 %) étaient en vie au 30ème jour. Au jour 180, treize (12,6 %) nécessitaient encore le recours à l’EER. La fonction rénale à six mois n'était pas significativement différente entre les patients ayant reçu des échanges plasmatiques (69 [41-91]) contre 43 [23-50] mL/mn/1,73m², p=0,17), de l'Eculizumab (55 [50-73] contre 69 [31-91] mL/mn/1,73m², p=0,57) ou de l’EER (49 [31-69] contre 69 [36-91] mL/mn/m², p=0,40). De plus, la durée de séjour en réanimation et à l'hôpital était significativement plus longue pour les patients ayant reçu un échange plasmatique et la durée d’EER était plus longue. Enfin, l’analyse multivariée montre que l’initiation de l’EER en réanimation est un facteur pronostique indépendant d’EER à 180 jours. Conclusion : Dans cette étude rétrospective multicentrique, 45% des patients admis en réanimation pour SHU ont eu besoin d’EER et 12,6% étaient encore dialysés à 6 mois. Les échanges plasmatiques, l'Eculizumab et la dialyse débutée en réanimation n’étaient pas significativement associés à une amélioration de la fonction rénale à 6 mois.