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Introduction : L’ustekinumab (Stelara®) est un anticorps monoclonal anti-interleukine (IL) 12/23 commercialisé depuis mars 2010. Il est indiqué en cas de psoriasis, rhumatisme psoriasique et depuis 2015 dans la maladie de Crohn. Une méta-analyse a alerté en 2011 sur un possible risque d’événements cardio-vasculaires graves (ECVG). L’ustekinumab pourrait déstabiliser les plaques d’athérome, via l’inhibition de la population lymphocytaire T helper 17. L’objectif était de rechercher un effet déclencheur d’ECVG à l’initiation de l’ustekinumab. Matériel et méthodes : L’ensemble des patients exposés à l’ustekinumab entre 2010 et 2016 a été identifié à partir des bases de données françaises de l’Assurance-maladie (SNDS-SNIIRAM). Les ECVG retenus étaient les syndromes coronariens aigus (SCA) et accidents vasculaires cérébraux (AVC). L’hypothèse d’une période à risque de 6 mois suivant l’initiation de l’ustekinumab a été testée par une analyse « case-time-control ». Elle compare, chez les sujets ayant fait un ECVG, le nombre d’initiations pendant les 6 mois qui précèdent les ECVG à celui des 6 mois antérieurs. Une interaction entre le niveau de risque cardio-vasculaire du patient (2 niveaux : faible ou élevé, en fonction des facteurs de risque cardiovasculaire) et l’initiation de l’ustekinumab sur les ECVG a été recherchée. Résultats : Parmi les 9290 patients exposés à l’ustekinumab, 75 ont présenté un SCA, un AVC ou un angor instable en cours de traitement. L’analyse « case-time-control » des 98 ECVG survenus avant, pendant ou après la cure, et des 392 « témoins pour la tendance temporelle », a montré des OR significativement différents selon le niveau de risque cardiovasculaire du patient. Chez les patients à faible risque cardiovasculaire, on n’observait pas d’effet déclencheur de l’ustekinumab (OR=0,30, IC 95% [0,03 ; 3,13]). Chez les patients à risque cardiovasculaire élevé, on observait un risque significatif de déclenchement d’ECVG par l’ustekinumab (OR=4,17 [1,19 ; 14,59]). Ce risque persistait dans les analyses de sensibilité. Discussion : Nos résultats suggèrent un « effet déclencheur » d’ECVG dans les mois qui suivent l’initiation de l’ustekinumab, identifié chez les patients à risque cardiovasculaire élevé, en cohérence avec l’hypothèse physiopathologique de déstabilisation des plaques d’athérome. Conclusion : Ces résultats incitent à des mesures de prudence dans l’indication d’ustekinumab chez les sujets à risque cardiovasculaire. Les autres biothérapies impliquant la voie lymphocytaire T helper17 (anti-IL17A, anti-IL17RA, anti-IL23), récemment commercialisées, pourraient être concernées par ce signal.