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Introduction : L’inaptitude au poste de travail est prononcée par le médecin du travail lorsque l’état de santé d’un salarié devient incompatible avec le poste qu’il occupe malgré la mise en place d’actions de maintien de l’emploi. Elle aboutit dans la majorité des cas à un licenciement et expose à un risque de désinsertion professionnelle. L’objectif principal de cette étude est de déterminer les indicateurs relatifs aux inaptitudes et d’analyser les déterminants qui les influencent, toutes pathologies confondues. Les objectifs secondaires étaient de préciser les facteurs de survenue d’une inaptitude en fonction de la maladie causale principale, de mieux cibler les actions de prévention et d’améliorer la qualité des données au sein de l’AST35. Matériel et méthode : Cette étude transversale et rétrospective s’est intéressée aux caractéristiques des salariés déclarés inaptes à leurs postes de travail au cours de l’année 2022 au sein d’un service de santé au travail interentreprises d’Ille-et-Vilaine. Les données anonymisées ont été extraites à partir du « logiciel métier » utilisé par les médecins du travail. Les taux d’incidence des déclarations d’inaptitudes ont été calculés tout d’abord de manière globale puis par affection causale principale. Une analyse multivariée avec régression de Poisson a été utilisée afin de déterminer les facteurs de risques de survenue d’une inaptitude toutes pathologies confondues sur l’ensemble de l’échantillon. Puis, une régression logistique a été pratiquée sur les salariés déclarés inaptes, par groupe de pathologies. Résultats : Au total, 153 776 salariés ont été inclus dont 1003 (soit 0,7%) ont été déclarés inaptes en 2022. L’estimation du taux d’incidence global des déclarations d’inaptitude était de 6,52 pour 1000 salariés (IC95% [6,13 – 6,93]) toutes pathologies confondues, de 403 pour 1000 salariés inaptes pour les maladies du système ostéo-articulaire ou MSOA (IC95% [371,45 - 432,14]) et de 313 pour 1000 salariés inaptes pour des troubles mentaux ou du comportement ou TMC (IC95% [283,39 - 340,74]). Les facteurs de risques d’être déclaré inapte étaient le genre féminin (p<0,001), l’âge (p<0,001), l’obésité (p = 0,013), l’ancienneté (p<0,001), le fait de bénéficier d’une prestation liée au handicap préalablement à l’inaptitude (p<0,001) ainsi que d’appartenir aux groupes des ouvriers ou des employés (p<0,001) ou encore d’être salarié d’une entreprise localisée dans une ville de moins de 5000 habitants. Les salariés présentaient un risque plus important d’être déclarés inaptes pour MSOA par rapport aux autres pathologies lorsqu’ils appartenaient aux groupes des ouvriers (p<0,001) ou des employés (p=0,004) ou lorsqu’ils bénéficiaient d’une prestation liée au handicap préalablement à leurs déclarations d’inaptitudes (p=0,029). Le risque d’être inapte pour TMC était augmenté lorsque l’entreprise était basée dans des villes de 5000 à 9999 (p=0,035) habitants ou d’au moins 50000 habitants (p<0,001) et que l’affection causale principale à l’origine de l’inaptitude était d’origine professionnelle (p=0,025). La dispense de recherche de reclassement faisant suite à l’inaptitude était, quant à elle, plus présente chez les inaptes pour TMC par rapport aux autres pathologies. Conclusion : Ces données vont permettre une meilleure orientation et priorisation des actions de prévention afin de prévenir le risque de désinsertion professionnelle. Cette étude sera reproduite sur les données de 2023 permettant ainsi un suivi des indicateurs relatifs aux inaptitudes et l’évaluation des mesures de prévention.