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Introduction : Les modalités thérapeutiques et le pronostic des cancers colorectaux diagnostiqués dans le cadre du dépistage organisé en France sont mal connus, notamment ceux des cancers superficiels. Aussi, les objectifs de cette étude ont été de déterminer le pronostic (survie à 5 ans et récidive) des cancers pT1, de décrire la prise en charge thérapeutique, d'analyser les facteurs associés à la récidive mais aussi à la prise en charge thérapeutique (chirurgie première vs endoscopie première et chirurgie après résection endoscopique vs résection endoscopique seule). Matériels et méthodes : Les données de l’ensemble des 207 patients atteints d'un cancer colorectal T1 diagnostiqué dans le cadre du dépistage national entre 2003 et 2015, en Ille-et-Vilaine, par coloscopie après test fécal, Hemoccult dans la majorité des cas, ont été analysées. Le critère principal d’évaluation était le pronostic des cancers superficiels. Les facteurs associés à une chirurgie d’emblée, à une chirurgie carcinologique après résection endoscopique mais aussi à la récidive ont été identifiés par analyse uni et multivariée. Résultats : 81 (39%) patients ont été opérés d’emblée et 126 (61%) patients ont bénéficié d’une résection endoscopique première dont 82 ont subi une chirurgie carcinologique complémentaire. Les facteurs de risque d’une chirurgie d’emblée étaient la présence d’un polype sessile, de taille ³ 20 mm et traités avant 2007. Une marge de résection < 1mm était le seul facteur de risque associé à une chirurgie carcinologique après résection endoscopique. La mortalité brute était de 2.4% et la survie à 5 ans de 96% [95%CI, 90.8 ; 97.9]. Le taux de récidive était de 5.6%. Le taux de survie sans récidive à 5 ans était plus élevé chez les patients traités par endoscopie que par chirurgie, mais la différence n’était pas statistiquement significative (log rank, p = 0.06). Deux facteurs de risque de récidive ont été mis en évidence, une marge pathologique < 1mm (HR 15.32, 95%IC 2.80-83.67; p = 0.0018) et une résection chirurgicale première (HR 12.24, 95%CI 2.36-63.57; p = 0.0029). En transférant dans le groupe résection endoscopique les six patients ayant eu une résection chirurgicale trans-anale, la stratégie thérapeutique n’était plus associée au risque de récidive. Le taux de complications après résection endoscopique était de 10%, de 22.2% après chirurgie première et de 26.7% après chirurgie carcinologique complémentaire. Aucun des 81 patients opérés d’emblée n’avait été référé à un endoscopiste expert et seulement 5 (2.5%) patients l’avaient été après la coloscopie diagnostique. Conclusion : Notre travail démontre que le pronostic des cancers colorectaux superficiels (pT1) diagnostiqués sur la base des tests fécaux dans le cadre du dépistage organisé est excellent, quelle que soit la prise en charge thérapeutique proposée. Il met en exergue une forte proportion de patients opérés d’emblée (39%). Parmi certains patients opérés d’emblée, la chirurgie aurait sans doute pu être évitée en adressant le patient à un endoscopiste expert. Parmi ceux opérés secondairement, la chirurgie aurait sans doute pu être évitée en respectant les critères histologiques qui permettent de conclure à une résection endoscopique curative.