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Contexte Dans différents pays d'immigration, la santé reproductive des femmes migrantes est moins bonne que celle des femmes de la population générale. D'après les données de l'enquête nationale confidentielle sur les morts maternelles (ENCMM), le risque de décès maternel en 2008 en France était plus important chez les femmes étrangères (OR=2). Méthodologie Il s’agit d’une étude de cohorte rétrospective. Les femmes enceintes migrantes primo-arrivantes suivies au sein du Réseau Louis Guilloux entre 2008 et 2015 ont été incluses exhaustivement. Les données étaient recueillies au sein du Réseau Louis Guilloux et du CHU de Rennes. Une analyse descriptive de leurs grossesses a été réalisée puis, via une comparaison de pourcentages en sous-groupes, l’impact de certaines variables sur les issues et complications de la grossesse a été évalué. Résultats A leur arrivée en France, 60% des 212 femmes migrantes étaient demandeuses d’asile, un peu plus de la moitié (55%) d’entre elles étaient sans domicile fixe, et leurs droits n'étaient pas ouverts dans 43% des cas. Un tiers des grossesses avaient débuté avant l'arrivée en France. Les femmes enceintes migrantes à Rennes avaient recours à l'IVG plus tardivement que les femmes en France (9,3 SA versus 8,4 SA). On retrouvait parmi celles-ci une forte proportion de mineures (p=0,011), le recours répété à cette intervention et un antécédent de violences subies (p=0,007). Pour les grossesses menées à terme, le suivi prénatal était sous optimal (60% avaient réalisé les 3 échographies recommandées par la HAS). Comparé à la population de l'enquête nationale périnatale de 2010, les femmes étaient plus fréquemment hospitalisées (25% versus 19%, NS), accouchaient plus souvent prématurément (8% vs 5,5%, NS), présentaient plus de déchirures périnéales (55% vs 43%, NS), avaient une prévalence plus importante d'hémorragies de la délivrance (10% vs 4%, NS). Il était constaté une disparité significative (p=0,034) selon l'origine géographique concernant la pratique de la césarienne, allant de 8% des accouchements chez les Européennes à 27,5% chez les Africaines originaires d'Afrique Sub-saharienne. Cinq pour cent des nouveaux-nés présentaient des malformation congénitales. Conclusion Les spécificités selon l'origine géographique, la précarité des femmes migrantes soulignent la complexité des phénomènes populationnels à laquelle doit répondre le système de soin actuel.