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Contexte : Alors que la chimio-radiothérapie (CRT) est bien validée dans les tumeurs du canal anal avancées, la prise en charge des tumeurs de stade précoce reste débattue et la radiothérapie (RT) exclusive est une option thérapeutique. Nos objectifs étaient de rapporter les résultats cliniques et d'analyser les profils de rechute et les facteurs prédictifs de récidive dans une cohorte de patients présentant des cancers du canal anal de stade précoce traités par RT exclusive. Méthodes : Nous avons inclus les patients traités consécutivement entre 1999 et 2015 dans 8 centres français par RT exclusive dans une intention curative pour un carcinome épidermoïde de l'anus, de stade T1 ou petit T2 (≤ 3 cm), sans envahissement ganglionnaire (N0), non métastatique. Des analyses univariées et multivariées ont été réalisées pour identifier les facteurs liés aux patients, aux tumeurs ou aux traitements, ayant un impact sur le contrôle locorégional (LRC), la survie sans maladie (DFS) et la survie spécifique liée au cancer (CSS) en utilisant le modèle des risques proportionnels de Cox pour estimer les Hazard Ratios (HR). Le LRC, la DFS et la CSS ont été estimées à l'aide de la méthode Kaplan-Meier et comparées à l'aide de tests de Log-Rank. Résultats : Nous avons identifié 141 patients consécutifs traités entre 1999 et 2015 par RT exclusive pour des cancers du canal anal T1 ou petits T2 (≤ 3 cm), N0. Après un suivi médian de 56 mois, nous avons observé 29 rechutes (20,6%). La plupart des rechutes étaient locales (83%) et accessibles à un traitement de sauvetage, principalement par résection abdominopérinéale (APR) (67%). Les taux de LRC, de DFS et de CSS à 5 ans étaient respectivement de 84,4 % ± 3,5 %, 74,0 % ± 4,2 % et 96,6 % ± 1,7 %. En analyse multivariée, le statut HPV-négatif était associée à de moins bons taux de LRC (HR 6,40 [IC 95 %, 2,44-16,79] ; p < 0,001), de DFS (HR 3,34 [IC 95 %, 1,39-8,03] ; p = 0,007) et de CSS (HR 9,47 [IC 95 %, 1,86-48,15] ; p = 0,007). Une durée totale de traitement (OTT) supérieure à 10 semaines était également associée de manière indépendante à des taux moins bons de LRC (HR 2,13 [IC 95 %, 1,10-6,35] ; p = 0,030) et DFS (HR 2,09 [IC 95 %, 1,01-4,32] ; p = 0,047). Enfin, la réalisation d'une irradiation des ganglions lymphatiques pelviens a été associée à une meilleure CSS (HR 0,22 [IC 95%, 0,06-0,84] ; p=0,027). Conclusion : La RT exclusive est une option thérapeutique appropriée pour les cancers du canal anal de stade précoce. Néanmoins, ce traitement est associé à une proportion significative de récidives. Les modalités de la RT (irradiation des ganglions lymphatiques pelviens et OTT) et le statut HPV semblent avoir une importance particulière.