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L’eau souterraine représente 98% de la ressource en eau douce liquide sur Terre. Vitale, avantageuse par ses propriétés spéciales mais, souvent, particulièrement vulnérable à long terme, face aux dégradations continues générées par l’ère anthropocène, elle devrait faire l’objet d’une réglementation exprimant toute la signification du « niveau élevé de protection de l’environnement » requis en droit primaire de l’Union européenne. C’est pourquoi la gestion intégrée des ressources en eau (GIRE) pratiquée par l’UE devrait tendre, pour cette eau, vers un degré supérieur de préservation d’un milieu hypogé singulièrement fragile, via une distinction plus marquée entre les notions de «gestion» et de «protection» intégrées, selon l’intensité de la préservation qu’elles emporteraient. A travers cette évolution de la gestion vers la protection intégrée, que l’on érigerait en mode d’intervention à part entière, le droit de l’UE définirait une nouvelle balance entre intérêts économiques et nécessités environnementales. Un tel renforcement du droit dérivé pertinent passerait avant tout par une conception rénovée des eaux souterraines, affranchie d’une conception trop sommaire, dans la directive-cadre sur l’eau et la directive 2006/118/CE, pour en appréhender toute la richesse. Ce, sous peine de ne les protéger que partiellement. Sans préjudice de l’unité du droit de l’eau, des aménagements spécifiques devraient ainsi être prévus pour les eaux souterraines, dont les dynamiques peuvent grandement différer, dans le temps et l’espace, de la surface. Les eaux souterraines ne pouvant être séparées de leur réceptacle (sol et sous-sol), leur protection intégrée requerrait en outre de transcender les limites de la politique de l’eau, et d’aller au-delà de l’intégration telle qu’on la connaissait dans le cadre de la GIRE. Cette dernière, en effet, n’efface pas toutes les contradictions entre politiques sectorielles. Aussi faudrait-il poursuivre la mise en cohérence desdites politiques concernées (environnementale, agricole, industrielle, énergétique…), dont la convergence devrait être accrue dans le sens d’une protection globale du milieu souterrain – une protection affermie pour laquelle pourraient se mobiliser l’ensemble des acteurs intéressés, s’ils étaient orientés vers cet objectif par des dispositifs plus appropriés.