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L'espérance se présente comme l'expérience d'un avenir qui n'a pas été encore vécu et qui se donne comme inobjectivable. Cette intuition a commandé la problématique de cette recherche, qui met au jour les conditions de possibilité d'une espérance véritable dans un monde – le nôtre – où elle ne trouve pas immédiatement sa place. Ce monde ''cassé'', comme l'appelle Gabriel Marcel, est sous l'emprise de la technique. C'est un monde où prime l'exigence du faire et où les questions existentielles sont réduites elles-mêmes à des ''problèmes'' qui doivent trouver leur ''solution'' comme n'importe quel problème relevant de l'ordre de l'avoir. Il y a, en ce sens, un ''problème de l'espérance ». Il se développe dans une philosophie qui s'émancipe de la foi et dont on trouve des illustrations notamment dans le probabilisme de Hume et dans le matérialisme de Bloch. Or Gabriel Marcel fait le pari, par la méthode dite de la ''réflexion seconde'', de placer l'espérance sous le sceau du ''mystère''. Il s'agit alors de comprendre que l'espérance, pensée sur le plan de l'être et non plus de l'avoir, relève d'une expérience qui est toujours en cours de formation, et qui ouvre le chemin que suit une personne que définissent sa capacité d'agir, ses relations avec les autres personnes et son aptitude à la responsabilité. Nous soutenons dans ce sens, avec l'appui de Ricœur, que l'identité du sujet de l'espérance est essentiellement intersubjective et ouverte, selon une exigence de fidélité créatrice. Nous trouvons plus précisément dans le nous familial, comme l'appelle Marcel, la condition de possibilité d'une expérience concrète de l'espérance, comprise alors comme patience d'un présent éprouvant et confiance en un avenir incertain. Renvoyant dos à dos, pour ce faire, les conceptions essentialiste et constructiviste de la famille, nous appelons vœu créateur ce qui, au sein même de la famille, dont nous proposons une conception élargie, est jaillissement du nouveau et promesse de vie. Ainsi nous affirmons que l'espérance, pour invérifiable qu'elle soit, est, mais selon des formes authentiques ou inauthentiques. L'enjeu de ce travail, en reconnaissant cette différence au cœur même de l'espérance, est de comprendre comment celle-ci, plus que comme un ensemble de moyens, se présente fondamentalement comme une mise en route qui se reçoit d'un appel de ou à l'autre, et qui est constitutive de toute action vouée au temps. La présence de cet autre déborde toute tentative d'objectivation. Elle est le lieu intérieur où se vit in fine l'attente active qu'est l'espérance comme expérience ontologique.