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Aux prémices de nos conversations : une étude comparative chez les nourrissons humains et les primates non-humains
(The beginnings of our conversations: a comparative study of human infants and non-humain primates) Meunier, Bastien - (2023-12-01) / Université de Rennes - Aux prémices de nos conversations : une étude comparative chez les nourrissons humains et les primates non-humains
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Langue : Français, Anglais Directeur(s) de thèse: Lemasson, Alban Discipline : Neurosciences, éthologie Laboratoire : EthoS Ecole Doctorale : SVS Classification : Sciences de la vie, biologie, biochimie Mots-clés : tour de rôle, proto-conversation, langage, socialité
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Résumé : Les conversations forment la niche principale à l’intérieur duquel le langage se déploie et prend son sens. Les conversations se caractérisent par un tour de parole qui peut être défini par une alternance de tours entre plusieurs interlocuteurs qui évitent les chevauchements et minimisent les silences. Ce pattern universel semble avoir des bases biologiques profondes : il est présent très précocement chez les nourrissons préverbaux, et dans les échanges vocaux produits dans de nombreuses espèces de primates non-humains. Ici, nous avons voulu étudier l’évolution de ces proto-conversations présentes chez des êtres non-parlants grâce à une approche comparative entre les nourrissons humains et les mangabeys à collier (Cercocebus torquatus). Pour ces deux modèles biologiques, nous avons étudié d’une part leur production de vocalisations selon un pattern de tour rôle, et d’autre part comment ils percevaient ce pattern, s’il s’agissait d’une règle. Ainsi, nous avons pu montrer que les nourrissons préverbaux sont sensibles à différents patterns conversationnels, et que cette sensibilité est modulée par des facteurs socio-démographiques. Nous avons aussi mis en évidence qu’ils interagissaient selon un tour de rôle avec leurs parents, mais que ces interactions dépendaient du sexe des nourrissons et des parents. Chez les mangabeys, nous avons pu confirmer qu’ils produisaient des échanges vocaux selon un pattern de tour de rôle, et que ces derniers dépendaient du statut social des individus et de la nature des liens avec leurs congénères. Si notre expérience de repasse ne nous a pas permis de déterminer si le tour de rôle était une règle pour cette espèce, elle a montré qu’avec l’âge les individus se désintéressaient des situations les moins pertinentes socialement. Nous avons donc pu mettre en évidence l’importance d’un tour de rôle modulé par des facteurs sociaux chez deux modèles non-verbaux. Ces résultats nous invitent à repenser l’évolution du langage au cœur de capacités interactionnelles, soulignant l’importance de l’approche comparative pour éclairer les bases biologiques de nos comportements communicatifs. Abstract : Conversations provide the main niche within which language evolves and makes sense. Conversations are characterized by a turn-taking that can be defined as an alternation of turns between several interlocutors that avoids overlaps and minimizes silences. This universal pattern seems to have deep biological foundations: it is present very early in preverbal infants, and in the vocal exchanges produced in many non-human primate species. Here, we aimed to study the evolution of these protoconversations present in non-speaking beings through a comparative approach between human infants and red-capped mangabeys (Cercocebus torquatus). For these two biological models, we studied both their production of vocalizations according to a turn-taking pattern, and how they perceived this pattern, if it were a rule. In this way, we were able to show that preverbal infants are sensitive to different conversational patterns, and that this sensitivity is modulated by socio-demographic factors. We also demonstrated that they engaged in turn-taking with their parents, but that these interactions depended on the sex of the infants and of the parents. In the case of mangabeys, we were able to confirm that they produced vocal exchanges in a turn-taking pattern, and that these depended on the social status of the individuals and the nature of the bonds with their conspecifics. While our playback experiment did not enable us to determine whether turn-taking was a rule for this species, it did show that as individuals aged, they lost interest in less socially relevant situations. We were thus able to demonstrate the importance of socially modulated turn-taking in two non-verbal models. These results invite us to rethink the evolution of language at the heart of interactional capacities, underlining the importance of a comparative approach to shed light on the biological bases of our communicative behaviours. |